The New Pope : Hollywood s’intéresse à l’étonnante persistance de la papauté

The New Pope John Malkovitch Jean-Paul III

La première scène de la deuxième saison de The Young Pope, allias The New Pope, décrit les frasques sexuelles d’une religieuse. Le diocèse de Venise, lui, parle même de profanation pour une autre scène, qui se déroule dans la célèbre abbaye Saint-George, louée pour l’occasion… En dépit du caractère outrancier de la série sur bien des aspects, nous avons choisi de prendre un peu plus de hauteur de vue et de publier la traduction d’un article du magazine Crux, aux Etats-Unis, qui souligne un regain d’intérêt d’Hollywood pour les questions religieuses. Avec plus ou moins de succès.

Quelques semaines seulement après la première diffusion du film « Les deux papes » sur Netflix, apparait une nouvelle version des rapports conflictuels entre souverains pontifes. Et bien que le scénario des « deux papes » d’Anthony McCarten doive être lu avec beaucoup de réserve – c’était une conversation imaginaire entre deux personnes réelles – « The New Pope » de Paolo Sorrentino est probablement destiné à être regardé avec encore beaucoup plus de distance…

Suite à l’énigmatique « The Young Pope » de 2016 avec Jude Law comme Pie XIII, la nouvelle saison de la série, sous le nom « The New Pope », présente John Malkovich comme pape titulaire, un certain Jean-Paul III, qui a pris ses fonctions après l’entrée dans le coma de Pie XIII…

Alors que la série « Les deux papes » semblait opposer politiquement un François progressiste et libéral à un Benoît XVI réactionnaire qui ne pouvait pas conduire l’Église vers la modernité, la série « The New Pope » semble plus intéressée par les opinions et les regards que par les projets papaux. (Lire aussi : Le pape choisit-il ses voyages comme dans la pub du Loto ?).

Bien que Paul Sorrentino souhaite ignorer les orientations habituelles de ces films et présenter Pie XIII comme un mystique ultra-conservateur, il semble que ce soit plus par esprit de contradiction que par sympathie pour l’aile traditionaliste de l’Église… Un critique sur le web a décrit The New Pope comme un spectacle “merveilleusement dingue” (lire aussi : Le pape fait-il des slams dans la foule ?).  Et Sorrentino est un réalisateur préférant montrer des images amusantes et absurdes plutôt que de s’attaquer aux questions qui se posent réellement devant l’Église et qui font les gros titres de la presse.

Paulo Sorrentino sur le tournage de la série The New Pope« Bien sûr, avec Paolo, vous comprenez la plupart des choses lorsque vous voyez ce qu’il filme. Sa façon de disposer les gens dans l’espace – dans une pièce ou à l’extérieur, à un moment de la journée – vous dit à peu près quoi en penser. Les rituels, les secrets, le symbolisme de l’Eglise : c’est une sorte de noix très difficile à casser avec des mots », a expliqué John Malkovich au journal The Independent.

Mais encore, il est surprenant de voir un sujet papal faire l’objet de deux productions majeures en si peu de temps. Les derniers films à ce sujet, « L’extase et l’agonie » et « Les Souliers de Saint Pierre », sont sortis au milieu des années 1960 et furent espacés de trois ans.

Bien sûr, tout comme « Les deux papes », le film de 1965 « L’extase et l’agonie » est une relation imaginaire entre personnages historiques, le pape Jules II et Michel-Ange. « Les Souliers de Saint Pierre » – comme « The Young Pope » et « The New Pope » – parlent d’un pontife fictif, le pape Kiril (un pape venant de l’autre côté du rideau de fer qui vend sa tiare et consacre la richesse de l’Église aux pauvres était une chose incroyable en 1968.)

Lire aussi : Un pape moderne porte-t-il la tiare ?

On pourrait également souligner que les deux films des années 60 sont sortis dans le sillage de Vatican II, lorsque le monde laïc parlait de l’Église catholique et se demandait ce que l’avenir réserverait à l’ancienne institution. Même s’il n’est pas vrai que le pontificat de François conduise à un changement d’époque religieuse comparable à Vatican II – bien que de telles déclarations aient été faites par ses partisans et ses détracteurs – son pontificat a enthousiasmé ceux qui font des films et des émissions de télévision. Ajoutant à cela la touche supplémentaire d’avoir un prédécesseur vivant logé dans les jardins du Vatican, il n’est pas surprenant que le pape soit “un sujet brûlant” en ce moment, et pas seulement à cause de son mini-maillot de bain…

Lire aussi : Le pape prend-il ses vacances à Venise ?

John Malkovich a fait remarquer à The Independent que le fait “qu’il y a en fait deux papes vivants” était “une chose assez unique dans une religion avec plus d’un milliard d’adhérents”. Dans son interview, l’acteur a également déclaré que l’intérêt pour le sujet était grand parce que l’Église “répond aux besoins qui existent naturellement chez tout individu”.

« Comment vivons-nous ? Pourquoi sommes nous ici ? Suis-je vraiment ici ? Nous oublions en quelque sorte de poser ces questions. C’est à cela que je pense que l’Eglise est destinée. Vous savez, je suis athée mais je comprends, a déclaré Malkovich, ajoutant que l’Église s’inscrit juste dans tous ces S : symbolisme, spiritualité, sacralité, secrets ». (Bon, pour les secrets, on se demande quand même un peu lesquels…) Même s’il a reconnu que le monde était « beaucoup plus laïque » qu’il y a 20 ans, il y a 50 ou 100 ans, Malkovich a déclaré que le moment présent est « un moment où les gens recherchent peut-être une raison, un sens spirituel, à leur existence. » Reste à voir si « The New Poe » aidera vraiment les gens à étancher cette soif spirituelle, mais il est bon qu’Hollywood remarque qu’elle est là.

Pour aller plus loin :

Les cathos aiment-ils The New Pope ?

The New Pope

Les cathos aiment-ils The Young Pope / The New Pope ? Pourquoi les médias chrétiens en parlent-ils si peu ? Boude-t-elle la série d’HBO-Canal+, ou bien… ? Quelles sont les retombées presse de ce côté-là ? Les cathos regardent-ils la télé ou sont-ils du siècle dernier ?

Un sentiment mitigé

Le sentiment global est plutôt mitigé, dirons-nous. L’hebdomadaire Famille chrétienne avait publié une critique de la saison 1 qui s’intitulait (à juste titre ?) Souverains poncifs. Ils fustigeaient une “représentation captieuse, fallacieuse de l’Église” : “Bienvenue au royaume de la caricature et de la provoc ! Le Vatican ? C’est Dallas…” A l’époque, Pèlerin Magazine décrivait Pie XIII comme un pape “imbu de lui-même, vitupérant, cassant, autoritaire et caractériel”. Pour la saison 2, ils se sont tu : un silence très élogieux. Comme d’ailleurs beaucoup d’autres médias catholiques…

Le grand écart

En revanche, du côté de l’hebdomadaire La Vie, sous la plume de Marie Lucile Kubacki, on est dithyrambique. Pas moins ! On cautionne ainsi “une grande série“, “une oeuvre poétique et profonde“, et même “une plongée métaphysique…” : rien que ça ! Sérieusement ? Bah oui…

Citons cet article in extenso :Paolo Sorrentino signe plus qu’une grande série sur les arcanes du pouvoir au Vatican, une œuvre poétique et profonde sur le mal et le combat spirituel. Une plongée métaphysique dans les abîmes de l’âme humaine, haletante comme un thriller, servie par des plans soignés et un casting de rêve : outre John Malkovitch, Jude Law, Silvio Orlando et Ludivine Sagnier, déjà cités, on retrouve Cécile de France, Sharon Stone et Marylin Manson, qui rivalisent de charme et de drôlerie…

Bon, pour la drôlerie, il faudra en reparler : d’ailleurs, quelle différence entre humour et dérision ? La journaliste en poste à Rome évoque tout de même du bout du lèvres que “certaines scènes sont choquantes” (quand on sait qu’un communiqué du diocèse de Venise parle de profanation…), “mais, ajoute-t-elle, les provocations même les plus délirantes de Sorrentino contiennent des questions qui sonnent très juste.” Ah, nous voici rassurés !

Beaucoup de questions sans réponses

Et le journal d’en faire la judicieuse liste :

– Un pape qui ne peut plus exercer son ministère car il est dans l’incapacité de le faire – à l’instar de Pie XIII, en coma à durée indéterminée – cesse-t-il absolument de l’être ?
– Quelle est la frontière entre le péché et la corruption ?
– Dieu « aime-t-il » certains papes plus que d’autres ?
– Qu’est-ce que l’idolâtrie (dans la première saison, Pie XIII refusait les photos et les objets à son effigie, ce qui n’a fait que décupler la fascination pour sa personne) ?
– Faut-il des saints pour gouverner l’Église ?
– Quel est le prix spirituel des nécessaires aménagements diplomatiques et politiques dans la gouvernance de l’Église ?
– Dans quelle mesure le pape doit-il faire de la politique ?
– Jusqu’à quel point un saint peut-il être un grand pécheur ?

Nous tâcherons donc de répondre patiemment à toutes ces questions qu’elle (se) pose. Et qui c’est vrai, méritent d’être abordées  : mais avait-on besoin d’une telle série pour cela ?

En attendant, nous vous proposons ces questions un peu plus terre-à-terre :

Cependant, The New Pope peut donner l’occasion à de nombreux catholiques de témoigner de leur foi en Jésus-Christ, car comme le disait le premier pape de l’Eglise, Saint Pierre, dans sa première lettre apostolique (*) : “Soyez toujours prêts à rendre compte de l’espérance qui en vous, faites-le avec douceur et respect”.

(*) La Bible, première lettre de Saint Pierre chapitre 3, verset 15.

Le pape boit-il du Coca Zéro cerise ?

Le pape boit-il du Coca Zéro à la cerise ? Serait-ce un placement de produit ?

A défaut d’avoir soif de rencontrer le Christ – dans ce cas, contactez immédiatement un de nos bénévoles sur le live chat’ de ce site, ici en bas à droite – le jeune pape Pie XIII pourrait vous donner soif ! A condition bien sûr d’aimer le Coca Zéro cerise. (Mais, d’après les spécialistes, un vrai pape ne se permettrait pas une hérésie pareille qui mérite le bûcher : ça montre bien l’ignorance des scénaristes). Cette information nous provient directement, via le net mondial, du blog américain Hollywood branded, traduisez littéralement par “marques embarquées à Hollywood”.

Mais avant de vous embarquer dans cette histoire de gros sous – (lire aussi : Le Vatican est-il riche ?), il faut dire que la chaîne qui produit la série The New Pope, HBO, est “au sommet de son art”, osons le dire sans détour, dixit ce blog marketing. Avec des séries primées comme Game Of Thrones et Silicon Valley, ainsi que de nouveaux succès et des critiques “hyper enthousiastes” sur la série Westworld, la chaîne est devenue célèbre pour sa production de “haute qualité” ! (Du moins d’un point de vue technique, parce que pour la réalité, dans The New Pope, il faudra repasser…). Elle attire donc un vaste public – magie de l’audience ! – surtout avec des séries à peine aguicheuses comme Sex And The City et The Sopranos.

Du coup, les autres chaînes qui la diffusent, comme Canal+, tirent aussi leurs marrons du feu, ce pourquoi cela vaut le coup de programme de telles séries, même si d’un point de vue descriptif, c’est du grand n’importe quoi. D’ailleurs, on aimerait bien savoir comment le réalisateur et les acteurs réagiraient si on peignait avec la même fantaisie critique leur famille (bah oui, chez les cathos, l’Eglise est leur famille) dans une telle fresque audiovisuelle (mais avons-le, ça ne serait pas très chrétien de leur part !).

Le casting de The Young Pope / The New Pope, il est vrai, a été soigné, avec une “liste de tueurs” (toujours d’après ce blog : mais qui veulent-ils tuer ?) avec Jude Law et Diane Keaton, et, depuis le nouveau titre de la série, The New Pope, John Malkovitch dans le rôle d’un deuxième pape (toute ressemblance avec la réalité du pontificat de François serait absolument totalement fortuite).

Avec des centaines de milliers de téléspectateurs, ces séries sont donc une mine d’or pour les marques qui cherchent naturellement à placer leur produit au cours des épisodes. Ainsi Hollywood Branded examine le placement “surprenant et réussi” – disent-ils – du produit Coke Zero – allias Coca Zéro – dans cette série. En l’occurrence, un Cherry Coke Zero, autrement dit, en bon français, un Coca Zéro à la cerise…

“Le jeune pape sait ce qu’il veut” (et c’est un Coca Zéro à la cerise)

Le jeune pape Pie XIII (toute filiation avec Pie XII serait là encore parfaitement fortuite !),“magistralement joué” (et parfois très bêtement, on se demande si c’est fait exprès) par Jude Law a été présenté en avant-première le 15 janvier 2016, donnant aux spectateurs “l’étrange vision” (sic !) du cinéaste italien Paulo Sorrentino sur le Vatican.

Dans la série, le premier pape américain vient d’être élu et il n’a que 57 ans, ce qui est assez jeune. En réalité, Jude Law a 47 ans et à l’écran, il ne fait pas son âge : du coup, c’est assez idéal pour toucher cette cible marketing. Ainsi, à partir du moment où il revêt son joli petit costume de pape, Pie XIII “ne marche pas à la légère” (venant d’un pape, ce serait étonnant) et il est très décidé. Il fait donc savoir aux gens ce qu’il veut : plus précisément, un Coca Zéro à la cerise ! Et que ça saute !

Dans l’une des scènes “les plus poignantes et mémorables”, “quoique ridicules” (sic) de ce spectacle, nous voyons ainsi le pape entrer dans sa salle à manger. Cependant, là-bas, il ne mange pas beaucoup. « Apportez-moi mon Cherry Coke Zero », ordonne-t-il. Comme cela, si le téléspectateur était un peu trop bête ou ne savait pas lire l’étiquette, la présence de la pub dans le script même du scénario permet d’éviter toute équivoque…

Un “génial” placement de produit

“Qu’est-ce qui est si génial dans ce placement ?” se demande notre blog. Et d’expliquer : “Le jeune pape, selon tous les témoignages, donne un étrange spectacle de la papauté. Pourtant, c’est devenu un sentiment général sur Internet et personne ne peut s’arrêter d’en parler… En contraste du Coca à la cerise, la scène avec le refroidisseur d’eau de bureau (sans marque) au milieu d’une grance pièce pleine de dorures est absolument à voir ! Ainsi, la série peut être fortement polarisante à certains moments et à d’autres, étrangement drôle (lire aussi : humour et déricision, quelle différence ?). Et la scène “Coke Zero”, telle qu’elle a maintenant été doublée, est l’un de ces grands moments de The Young Pope qui parvient à combiner les deux !“. Ah, ok, on voit bien que vous êtes enthousiaste et on ne voudrait pas vous refroidir…

“En réalité, et c’est là que c’est très fort, nous ne voyons jamais le logo Coca-Cola et nous ne voyons jamais réellement le Pape Pie XIII profiter de la boisson. Mais la vérité est que nous n’en avons pas besoin. Ce placement reste pour ainsi dire avec nous en tant que public, parce qu’il est si vivant, si étrange et différent de tout ce que nous voyons habituellement !”. Clairement, en effet, une belle innovation artistique !

Ultime précision – pour le cas où vous n’auriez pas compris le miracle de ce placement : “Le personnage de Jude Law répète trois fois la phrase “Coca Zéro cerise” dans cette scène, totalisant trois placements à l’oral. Mais au-delà, l’idée que le premier pape américain, qui ne prend pas de petit-déjeuner et refuse de faire quoi que ce soit jusqu’à ce qu’il ait son Coca Zéro cerise est le point focal de toute la scène. Ainsi, le placement est mémorable, avant-gardiste et honnêtement assez brillant.”

Déjà que la série est géniale et brillante, ça fait beaucoup de magnificence. Mais en réalité, le pape boit sûrement de la bière d’abbaye, et pas n’importe laquelle : nous y reviendrons !

A suivre…

Mise à jour 12:32 : un internaute nous envoie la photo ci-dessous (déjeuner du pape avec 1500 pauvres de Rome) et sur la table du Coca normal et du Fanta, mais pas du tout de Coca à la cerise…

Le pape boit du Coca normal
Le pape boit du Coca normal

Pour aller plus loin :

The New Pope : le diocèse de Venise réagit à une scène

Abbayé Saint George - Venise - The New Pope

En référence à quelques scènes filmées à Venise et la musique de la série télévisée “The New Pope”, voici une note du délégué de l’évêque de Venise pour la culture, Don Gianmatteo Caputo (traduction de PieXIII.com).

« Les images de la série The New Pope de Sorrentino ont suscité différentes réactions dans son contenu. Il s’agit d’une série fantaisiste et la créativité artistique du réalisateur cherche à provoquer des réactions controversées, parfois irrévérencieuses et provocantes. Ainsi la scène qui se déroule à l’abbaye Saint George de Venise est offensante, dépourvue en outre d’un contexte narratif justifiant son existence.

Par conséquent, ce qui est offert aux spectateurs n’est qu’un plan semblable à un clip vidéo réalisé dans un lieu fondamental de l’histoire et de la tradition monastique à Venise, abbaye Saint George, transformé en une sorte de scène de danse, au contenu clinquant et allusif, placé sous le symbole chrétien par excellence, la Croix.

Il y a offense et profanation du symbole de la croix, point n’est besoin de la censure pour le constater. Il est inapproprié car il est basé sur la volonté délibérée de provoquer et de susciter des réactions. Dans d’autres cas, il faudrait peut-être simplement l’ignorer pour faire échouer son objectif. En tout état de cause, il aurait été souhaitable de ne pas autoriser l’utilisation de cet espace de grande valeur historique et symbolique pour le tournage qu’est l’abbaye Saint George de Venise.

La scène en question…

 

Source : patriarcatovenezia.it

The New Pope : bande-annonce officielle

Et voici la bande-annonce officielle de la sulfureuse série The New Pope. Sous-titre : “Tout le monde peut être un saint” (ce qui n’est pas faux… sans doute d’ailleurs la seule chose vraie de toute la série !).

 

Réalisateur : Paolo Sorrentino

Casting : Jude Law, Diane Keaton, John Malkovitch…

Synopsis : Pie XIII (rien à voir avec Pie XII) est dans le coma. Après un premier conclave tumultueux, Sir John Brannox, un aristocrate anglais modéré, charmant et sophistiqué, est placé sur le trône papal. Ce nouveau pape parfait dissimule en fait des secrets et fait preuve d’une certaine fragilité…

Encore des secrets, donc, pour cette suite de la première saison qui s’appelait The Young Pope. Si vous l’avez manquée, vous pouvez aussi revoir la première bande-annonce qui date de 2016.

Série diffusée sur :

Pour aller plus loin :

 

Le Vatican est-il riche ?

L'exubérance de Pie XIII tranche avec la simplicité du pape actuel..

L’exubérance de Pie XIII (Jude Law), dans The Young Pope / The New Pope, tranche avec la simplicité du pape actuel, qui reçoit des SDF au Vatican…

Parlons gros sous : le Vatican est-il riche ? Pas tant que ça, détrompez-vous : voici un détail de son budget, dépenses et recettes, d’après Théo, l’encyclopédie catholique pour tous (édition 2009).

Les budgets du Vatican

L’organisation interne du Vatican se subdivise en deux types de services : ceux qui assurent le fonctionnement interne de la Cité du Vatican et ceux qui contribuent au gouvernement de l’Église universelle. L’organisation financière se fait en deux budgets distincts, auxquels il faut ajouter le budget des missions qui est totalement indépendant.

Le budget du Saint-Siège

Ses dépenses ont trait à tout ce qui concerne le gouvernement de l’Eglise universelle. Elles comportent en premier lieu, les traitements et retraites du personnel concerné (en 2007, 2748 personnes, depuis les secrétaires jusqu’aux cardinaux de la Curie ; soit 778 ecclésiastiques, 333 religieux, 1637 laïcs – dont 425 femmes – auxquels il faut ajouter 929 retraités).

Les dépenses comportent, en second lieu, les frais de fonctionnement et de déplacement (on compte de nombreuses rencontres internationales chaque année). En 2007, le montant total de dépenses était de 245,8 millions d’euros, contre un montant total de recette de 236,7 millions d’euros, soit un déficit de 9 millions d’euros (après trois années de gains des exercices antérieurs).

L’activité institutionnelle du Saint-Siège, secrétairerie d’État, congrégations, conseils, tribunaux, synodes et autres organismes, ne produit aucun bénéfice.

Le budget du Saint-Siège comprend également les frais des nonciatures apostoliques et des représentations pontificales sur les cinq continents auprès des organisations internationales, qui sont au nombre de 178.

Lorsque Jean-Paul ll est devenu pape, il n’y avait que 77 représentations diplomatiques du Saint-Siège. Cette augmentation est liée notamment au développement des relations entre les États, aux voyages du Saint-Père et aux nouveaux pays d’Europe de l’Est. Ce développement pèse sur le budget du Saint-Siège.

Certaines institutions rattachées au Saint-Siège présentent un déficit structurel : Radio Vatican (367 salariés) et le journal officiel du Vatican, L’Osservatore Romano (117 salariés) qui n’ont aucun soutien publicitaire (et pour cause).

En revanche, la Typographie, la LEV (maison d’édition vaticane — 114 salariés) et le CTV (centre de télévision vaticane — 20 salariés) sont bénéficiaires.

La contribution des diocèses en 2007 s’est élevée à 18,7 millions d’euros. Les plus gros contributeurs étant : l’Allemagne (31,5 %), les États-Unis (28,3 %), l’Italie (18,9 %) et l’Autriche (3,7 %).

Le denier de Saint-Pierre (contribution des fidèles) a permis de recueillir près de 50,8 millions d’euros en 2007 (contre 74,6 millions d’euros en 2006). Les pays les plus contributeurs sont : les Etats-Unis (28,3 %), l’Italie (13%), l’Allemagne 6,1%), I’Espagne (4,1 %) et la France (3,7 %).

Habituellement, le saint-père destine le Denier à des interventions caritatives en faveur des populations de divers pays du monde frappes par des catastrophes, au soutien de nombreuses initiatives des communautés ecclésiales du tiers-monde et à aux Églises locales les plus pauvres.

Le Gouvernorat de la cité du Vatican

Le bilan économique de la Cité du Vatican, qui comprend ses musées et ses services propres comme toute ville (de la pharmacie au supermarché), est indépendant de celui du Saint-Siège. Le Gouvernorat a en charge l’entretien et la restauration des bâtiments et musées situés dans l’enceinte du Vatican, le financement de la Garde suisse, de la Gendarmerie pontificale, ainsi que les traitements et retraites du personnel de ses services propres (900 retraités et environ 1 700 salariés :
ouvriers, pompiers, gardes, employés de la poste vaticane, gardiens, etc.).

L’accès au magasin hors taxes est réservé au personnel et l’organisation médicale gratuite, avec un très faible ticket modérateur, améliorent le niveau de vie.  L’Association des employés laïcs du Vatican (ADLV) joue le rôle de syndicat.

Les recettes du Gouvernorat de la Cité du Vatican proviennent principalement des ventes de timbres, de monnaies de collection et des entrées des musées. En 2007, ce budget est positif de 6,7 millions d’euros, contre 21,8 millions d’euros pour l’exercice 2006. Le Gouvernorat couvre aussi la moitié du déficit de Radio-Vatican (12,2 millions d’euros en 2007).

Le Gouvernorat fait appel au mécénat pour de grosses dépenses, comme la restauration de la chapelle Sixtine, qui a été financée par une chaîne de télévision japonaise.

Pour aller plus loin :

Quelle est la place de l’Eglise catholique dans le monde ?

L'élection d'un nouveau pape, un évènement planétaire transformé ici en scène machiavelique...

L’élection d’un nouveau pape, Pie XIII (photo ci-dessus), un évènement planétaire transformé dans The Young Pope en scène machiavélique, avec un Pie XIII imbu de lui-même, vitupérant, cassant, autoritaire et caractériel, d’après Pèlerin magazine… Mais quelle est la véritable place de l’Eglise dans le monde ?

Dans la vision extravagante et sarcastique du réalisateur de la série The Young Pope / The New Pope vendue dans plus de 110 pays, il n’est nullement question de l’importance de l’Eglise catholique, qui se tient pourtant au chevet du monde. Au contraire, même, le réalisateur et scénariste italien Paolo Sorrentino a déclaré « Il est illusoire de croire que l’Eglise a pris le chemin de l’ouverture et des bras tendus ». Qu’en est-il, en réalité, des bras ouverts de l’Eglise envers des millions de personnes, alors que pas plus tard que dimanche dernier par exemple, le pape François lui-même recevait des milliers de personnes sans domicile fixe au Vatican ? Deux auteurs, Austen Ivereigh et Natalia Trouiller, nous apportent ici une réponse à cette question, extraite de leur livre Comment répondre aux questions brûlantes sur l’Eglise sans refroidir l’ambiance

Un acteur mondial doté d’une vision mondiale

À l’heure actuelle, l’Église catholique compte 1,2 milliards de fidèles (17,5 % de la population), répartis sur tous les continents : 50% en Amérique du Nord et du Sud, un 25% en Europe, et le nombre de fidèles ne cesse d’augmenter en Afrique (16%), en Asie (11 %) et en Océanie (moins de 1 %). On compte plus de 5.000 évêques, environ 405.000 prêtres, 41.000 diacres mariés, 55.000 religieux et plus de 700.000 religieuses présents dans des centaines de pays.

L’Église catholique a la responsabilité de plus de 220 000 paroisses, 5 000 hôpitaux, 17 500 dispensaires et 15 000 maisons de retraite, ainsi que des dizaines de milliers d’écoles. Elle est certainement un des plus grands organismes d’aide au développement, si ce n’est le plus grand. Caritas Internationalis, une confédération de 165 organisations catholiques nationales à but caritatif, présente dans plus de 200 pays, basée à Rome et fondée il y a plus de soixante ans, estime son budget annuel à plus de 5 milliards de dollars. En Afrique, pour ne prendre que cet exemple, l’Eglise tient un quart des hôpitaux, et ses écoles reçoivent et instruisent environ 12 millions d’enfants chaque année. L’Eglise catholique soigne, éduque, forme et accompagne des millions de personnes à travers le monde entier. Il s’agit de l’acteur le plus important et le plus influent de la société civile mondiale.

Sa vraie richesse : son expertise en humanité

La richesse de son expérience et de sa sagesse, acquises par sa présence dans le monde, lui offre une véritable « expertise en humanité(1) », qui légitime ses prises de position morales à l’échelle internationale. L’Église catholique est le seul corps religieux à avoir une présence officielle aux Nations Unies, grâce à son statut d’Etat observateur.

C’est la seule religion à bénéficier d’un corps diplomatique (le plus ancien existant à ce jour). L’Église est un partenaire majeur des « Objectifs du millénaire pour le développement » (OMD), le plan d’action mondial des Nations Unies, et se bat sans relâche pour l’annulation de la dette et en faveur de multiples autres formes d’aide financière pour les pays en voie de développement.

A l’avant-garde de nombreuses causes

Le Vatican est le premier Etat du monde à avoir un bilan carbone neutre. Le pape François souhaite d’ailleurs que toute l’Église dans le monde entier suive cet exemple et fasse de la bonne administration de la création la plus importante de ses questions sociales.

Le Saint-Siège joue un rôle capital dans les négociations de désarmement et dans les traités sur le commerce des armes; il fait campagne contre la peine de mort, il négocie la libération d’otages et participe à la résolution de conflits. Il défend également des réformes destinées à mettre davantage l’économie au service de l’humanité.

En 2011, par exemple, le Conseil pontifical Justice et Paix a appelé à mettre en place de nouvelles structures mondiales capables de restreindre et de réguler les marchés financiers internationaux en vue du bien commun, en soutenant notamment l’idée d’une taxe sur les transactions financières.

Toutes ces initiatives pourraient être considérées comme progressistes, mais l’Église juge tout aussi progressiste son opposition aux lois favorables à l’avortement, au suicide assisté, au mariage pour les couples homosexuels, aux recherches sur les cellules souches embryonnaires, à la fécondation in vitro, à la gestation pour autrui et à la peine de mort que sa défense des migrants, des victimes des trafics humains et des personnes sans emploi.

La dignité des personnes avant tout

Le point commun de tous ces sujets est la défense de la dignité de la personne humaine, même si cette dignité n’est pas évidente pour la majeure partie de la société. Les droits et la dignité des bébés avortés, des enfants élevés dans un foyer homosexuel et privés d’un père ou d’une mère, des personnes âgées hospitalisées et des étrangers ne sont pas reconnus. Ils sont les victimes d’une « société du déchet », selon la puissante métaphore du pape François: « Malheureusement, ce ne sont pas seulement la nourriture ou les biens superflus qui sont objet de déchet, dit-il, mais souvent les êtres humains eux-mêmes, qui sont ‘jetés’ comme s’ils étaient des ‘choses non nécessaires’ (2) »

Le Saint-Siège, grâce à sa présence dans l’ensemble du monde et à l’attention qu’il porte à tous les hommes, a une position unique, qui lui permet de coordonner des réponses à des défis mondiaux tels que le trafic des êtres humains, le commerce des armes ou la peine de mort, que le pape François qualifie de méthode de punition « cruel(le), inhumain(e) et dégradant(e) », qui « ne rend pas justice aux victimes mais fomente la vengeance » (3).

Le Saint-Siège peut aussi apporter son aide à toutes les personnes exclues des structures traditionnelles qui protègent les plus vulnérables (comme les syndicats, par exemple). En octobre 2014, le pape François a prononcé un discours devant les participants la Rencontre mondiale des Mouvements populaires, afin d’appeler à la reconnaissance de leurs droits. Il est difficile d’imaginer n’importe quel autre dirigeant déclarer aux éboueurs, aux professionnels du recyclage, aux marchands ambulants, aux couturiers, aux pêcheurs, aux agriculteurs et aux autres travailleurs du secteur informel que « déjà à présent, chaque travailleur, qu’il appartienne ou non au système officiel du travail salarié, a droit à une rémunération digne, à la sécurité sociale et à une retraite, (…) je désire aujourd’hui unir ma voix à la leur et les accompagner dans la lutte. » (4)

Pour aller plus loin :

Notes :

  1. Selon les termes de Paul VI dans un discours aux Nations Unies, le 4 octobre 1965.
  2. Discours du Pape François au Corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège, 1 3 janvier 2014.
  3. Lettre au président de la Commission internationale contre la peine de mort, 20 mars 2015.
  4. Discours aux participants à la Rencontre mondiale des Mouvements populaires, 28 octobre 2014.

Jésus fait-il de la politique ?

L'élection du présomptueux pape Pie XIII, dans la série The Young Pope : à l'inverse de celle du pape François.
L’élection du présomptueux pape Pie XIII, dans la série The Young Pope / The New Pope : à l’inverse de celle du pape François, qui, lui, s’était incliné et avait demandé la bénédiction du peuple de Dieu.

Dans The Young Pope / The New Pope, le vicaire du Christ, Pie XIII, fait de la politique de bas étage. Mais au fait, Jésus, lui, fait-il de la politique ? La réponse du Père Henri-Dominique Lacordaire, dominicain, un des précurseurs du catholicisme moderne, dans son fabuleux livre Qui est Jésus-Christ ?qui nous fait entrer dans l’intimité de Jésus.

Jésus-Christ voulait être reconnu comme Dieu, aimé comme Dieu, servi comme Dieu, adoré comme Dieu : il semble que la volonté dût quelquefois fléchir sous un si lourd fardeau, et que du moins Jésus-Christ devait recourir à tous les moyens humains capables d’assurer le succès d’une aussi gigantesque ambition (et y compris la politique, ndlr). Il n’en est rien, Jésus-Christ a méprisé tous les moyens humains, ou plutôt il s’en est abstenu.

La politique compte au premier rang de ces moyens. Elle est l’art de saisir dans un moment donné la tendance des esprits, d’assembler des opinions et des intérêts qui recherchent satisfaction, de pressentir ce que veut un peuple sans qu’il en ait toujours lui-même une conscience exacte, de se poser, à l’aide des circonstances, comme son représentant naturel, et de le pousser un jour sur une pente qui nous emportera
avec lui pour cinquante ans. Telle est la politique, art illustre, dont on peut user pour le bien et pour le mal, et qui est la source des vicissitudes heureuses et malheureuses parmi les nations.

Jésus-Christ était admirablement placé pour se faire l’instrument d’une révolution qui eût servi ses desseins religieux. Le peuple dont il était issu avait perdu, sous le joug des Romains, les restes de son antique nationalité. La haine de Rome y était au comble, et chaque jour les déserts et les montagnes de la Judée voyaient se former des bandes libératrices, sous le commandement de quelque patriote pourvu de hardiesse ou de considérations (voir aussi notre site La Résurrection du Christ).

Ces mouvements étaient secondés par des prophéties célèbres, qui avaient annoncé de longue main au peuple juif un chef et un sauveur. Le rapport de ces idées et de ces intérêts avec le nouveau royaume dont Jésus-Christ annonçait la venue prochaine, était manifeste.

Cependant, loin d’y conniver et de s’en servir, Il les foule aux pieds. On lui demande, pour le sonder, s’il faut payer le tribut à César, il se fait apporter une pièce de monnaie, et s’informant de qui en est l’image et l’inscription, il répond ensuite froidement :

« Rendez donc à César ce qui est à César; et à Dieu ce qui est à Dieu. » (c’est cela, la laïcité, ndlr).

Il va plus loin. Il annonce la ruine temporelle de sa nation. Il parle contre le temple, objet de la vénération
religieuse et patriotique des Juifs, et il prédit ouvertement qu’il n’en restera pas pierre sur pierre, ce qui fut cause qu’on rangea ce grief parmi les accusations portées contre lui devant la souveraine magistrature.

Sa doctrine, très favorable au peuple et aux petits, était de nature à lui concilier une grande popularité, ce qui est un ressort admirable pour les révolutions. Il obtint, en effet, l’ascendant sur le peuple, jusque là qu’on veut l’élire pour roi d’Israël, mais il s’enfuit pour éviter cet honneur, et brise entre ses mains une arme que le vulgaire des grands hommes eût estimée un don et un aveu du Ciel.

Conclusion :  Jésus s’est passé de la politique.

  • Pour aller plus loin : se procurer le livre Qui est Jésus-Christ ? sur Amazon.

Les cathos ont-il un problème avec le sexe ?

Ludivine Sagnier - The Young Pope - Pie XII

Dans la première saison de la série The Young Pope / The New Pope, on voit Esther (Ludivine Sagnier), qui, faute d’avoir un enfant avec son mari garde-suisse, s’entiche d’un prêtre et bientôt, du pape Pie XIII, pas insensible à ses avances… Chaude ambiance !

Alors, les cathos et le sexe, voyez-vous le rapport ? Pourtant, dans la série, il apparaît clairement que les catholiques ont nécessairement un problème avec leur sexualité : les prêtres (y compris le pape) sont des frustrés et ont manqué l’amour de leur vie, les autres estiment que ce n’est qu’une question de procréation (sic). Enfin vous connaissez le topo…  Notre envoyée spéciale, Lidy Commandement, est partie enquêter : interview.

Comment ont commencé vos recherches ?

Lidy Commandement : J’ai voulu commencer par… le commencement. Chaque religion a son livre sacré. Chez les chrétiens, c’est la Bible. Et là vous ne devinerez jamais sur quoi je suis tombée… un poème érotique ! Si si, vous pouvez aller voir par vous-même ! Cela s’appelle le Cantique des Cantiques. Fait encore plus étrange, ce poème érotique, se trouve… pile au milieu de la Bible, comme en son cœur. Ce qu’il y a d’étonnant dans ce poème c’est qu’a aucun moment il n’est question d’enfant à venir ou de grossesse ! Bref, l’amour physique, l’amour passion, n’est pas l’inverse de la foi dans une religion monothéiste. Je ne résiste pas au plaisir de vous en citer quelques lignes (chapitre 7, traduction Louis Segon) :

« Le bien aimé : les contours de ta hanche sont comme des colliers, œuvre des mains d’un artiste. Ton ventre est une coupe arrondie, où le vin parfumé ne manque pas. Ton sexe est un amat de froment entouré de lis. Tes deux seins sont comme deux faons, jumeaux d’une gazelle. Ton cou est comme une tour d’ivoire ».

Et un peu plus loin :

« Ta stature ressemble au palmier, et tes seins à des grappes. J’ai dit : je monterai au palmier, j’en saisirai les fruits ! Que tes seins soient comme des grappes de raisin, le parfum de ton souffle comme celui des pommes, et ta bouche comme le vin du bonheur. La bien aimée : Il coule tout droit pour mon bien aimé, il glisse sur les lèvres de ceux qui dorment ! Je suis à mon bien aimé, son désir est sur moi. »

Donc le plaisir sexuel n’est pas un interdit dans la religion catholique ?

C’est ce que je me suis tout de suite dit ! Alors là j’ai fait un truc, et vous pouvez tenter l’expérience. Je suis allée sur Google et j’ai tapé les deux mots « plaisir, sacré » pour voir comment ces notions a priori contradictoires cohabitaient ensemble. En tête des recherches, Amazon.fr me proposait un livre au titre complètement révolutionnaire : « Ne gâchez pas votre plaisir, il est sacré ! Pour une liturgie de l’orgasme », écrit par Olivier Florant, un sexologue… théologien (comme quoi, on peut être sexologue et théologien à la fois !). Je l’ai tout de suite acheté ! Ce livre surprenant et captivant ouvre des horizons bouleversants. Il explique que le mariage chrétien ne se limite pas à la procréation. Le désir physique, le plaisir, bref, le sexe, le vrai, en font totalement partie. Mieux encore, le respect envers la personne prôné par la religion chrétienne peut même porté le plaisir sexuel jusqu’à  des bonheurs réciproques que l’on n’atteint pas autrement !  Le livre montre que faire l’amour est un art.

A un moment une comparaison est intéressante. L’auteur prend l’exemple de l’art de gastronomie ! Simple mais parlant. Un repas réussi, c’est d’abord un bon moment passé ensemble. Tout compte pour cela : les sensations exquises ressenties par nos papilles, le temps pris pour  goûter, et apprécié, la décoration de la table, les conversations. Pour l’Eglise, le plaisir du sexe pour le plaisir du sexe n’a pas de sens. Mais le plaisir pour nous unir, oui. Car nous sommes faits pour vivre ensemble, être en relation, et nous aimer. D’ailleurs, savez vous que le film préféré du pape François est le Festin de Babette ?

olivier-florant-livre-sexualiteDonc l’Eglise n’autorise pas le sexe que pour la procréation ? Et pourquoi alors s’oppose-t-elle à la contraception ?

Bien sur que  l’Eglise n’autorise pas le sexe que pour la procréation ! D’ailleurs si c’était le cas elle refuserait le mariage aux couples qui ont dépassé l’age de la fertilité. Et ce n’est pas le cas, depuis toujours l’Eglise accueille et marie des personnes qui désirent consacrer leur amour et qui ne sont plus en âge de procréer. En fait, il faut bien remettre les choses à leur place et relier correctement jouissance et procréation.

Olivier Florant cite D.H. Lawrence commentant lui même son sulfureux roman l’Amant de Lady Chatterley : « Nous savons cela, le phallus est une colonne de sang qui remplit la vallée de sang d’une femme. La grande rivière de sang masculin touche jusque dans ses profondeurs la grande rivière de sang féminin et pourtant aucun d’eux ne brise ses frontières. C’est la plus profonde de toutes les communions, comme le savent en pratique toutes les religions ».

Si l’Eglise exige une ouverture à la vie, c’est parce qu’elle rappelle que l’acte sexuel dans toutes ses dimensions est un hymne à la vie et à la communion. Il est donc important de laisser la vie suivre son cours et de ne pas dénaturer l’acte.

Olivier Florant nous fait part également des confidences reçues de ses patients en tant que thérapeute. Il explique cliniquement les rapports entre jouissance et procréation :

« Pour les femmes, le don du sperme a un sens fort. Certaines femmes confient ressentir et apprécier le passage du sperme dans leur vagin. (…) La puissance virile reste liée au sperme dans les arrières pensées. (…). Pour la plupart des hommes, l’insémination est considérée comme essentiel à l’acte sexuel pour qu’il soit total, complet, satisfaisant. (…) Le véritable achèvement de l’acte sexuel dans la profondeur du psychisme comporte la procréation. Sinon il n’en est qu’une tentative. C’est la seule explication possible des sexologues pour comprendre les actes manqués de contraception. Si tel n’était le cas, on ne saurait expliquer un si grand nombre d’échecs de la contraception quelque soit la méthode employée. »

La bonne nouvelle qu’annonce l’Eglise sur le sexe, c’est aussi que le couple peut aussi utiliser les périodes infertiles de la femme pour célébrer son amour. Elle pose la question suivante : se limiter aux périodes infertiles quand on ne veut pas de nouvel enfant pendant un temps, est-ce une contrainte intolérable pour l’épanouissement érotique ? « Boulimie n’est pas gastronomie » répond Olivier Florant !

Sexe : quand les papes contredisent The Young Pope !

Dans The Young Pope, la très *trop* fervente catholique Esther (Ludivine Sagnier, photo ci-dessus) estime que le sexe est uniquement fait “pour la procréation” (sic)…

« Le sexe est fait pour la procréation ». C’est qu’Esther (Ludivine Sagnier) affirme sérieusement à son mari garde-suisse qui lui reproche à demi-mots de ne pas éprouver de plaisir. Comme si c’était ce qu’enseigne l’Eglise ! En attendant une explication plus longue, voici un florilège de citations, envoyé par un de nos lecteurs, qui contredisent totalement que l’Eglise réduit la fonction de la sexualité à la procréation. En effet, la sexualité est sainte et bonne en tant que telle, et un de ses fruits est la fécondité, mais il n’est ni le seul, ni le premier !

Pape François

« L’érotisme le plus sain, même s’il est lié à une recherche du plaisir, suppose l’émerveillement, et pour cette raison il peut humaniser les pulsions. Par conséquent, nous ne pouvons considérer en aucune façon la dimension érotique de l’amour comme un mal permis ou comme un poids à tolérer pour le bien de la famille, mais comme un don de Dieu qui embellit la rencontre des époux. Étant une passion sublimée par un amour qui admire la dignité de l’autre, elle conduit à être une pleine et authentique affirmation de l’amour qui nous montre de quelle merveille est capable le coeur humain, et ainsi pour un moment, on sent que l’existence humaine a été un succès ».

Benoît XVI

« C’est seulement lorsque les deux se fondent en une unité que homme ou femme devient vraiment lui-même : c’est dans la communion avec l’autre sexe qu’il peut devenir complet »
« L’Eros ivre et indiscipliné n’est pas montée ni extase vers le divin, mais chute et dégradation », mais si les époux avancent sur un « chemin de montée, de renoncement, de purification et de guérison » il peut alors « goûter non le plaisir d’un instant mais comme l’avant-goût du sommet de l’existence, de la béatitude vers laquelle tend tout notre être. Oui, l’Eros peut élever en extase vers le Divin ».

 

Jean-Paul II

« L’éternelle, la constante, la puissance attirance sexuelle de l’homme et de la femme est à trouver dans le Mystère même de Dieu-Communion, dans ce « Une seule chair » originel, dans la joie immense de la rencontre et de la communion d’Adam et Eve qui forment en cela « le modèle pour tous les hommes et pour toutes les femmes qui, à n’importe quelle époque, s’uniront l’un à l’autre »
« A travers l’un et l’autre, mari et femme, le langage du corps devient la langue de la liturgie (qui) élève le pacte conjugal aux dimensions du mystère »
« A la mesure de leur écoute et attention à l’autre, dans le soucis de ne pas d’abord prendre mais de donner cela« conduit homme et femme à participer à cet étonnement originel qui pousse Adam à crier ‘C’est l’os de mes os, la chair de ma chair’, étonnement dont on perçoit l’écho dans le Cantiques des Cantiques : ‘tu me fais perdre les sens, ma sœur, ô fiancée’ ‘. Ainsi, « loin d’appauvrir les manifestations affectives des époux, (cela) les rend spirituellement plus intenses et par conséquent les enrichit ».
«  Le Cantique des Cantique développe en un livre l’exultation d’Adam d’Adam lors du ‘une seule chair’ de la Genèse : « en un ample dialogue mutuel où s’expriment et se répètent continuellement stupeur, allégresse, fascination, séduction, dialogue, affection, admiration, ravissement, attachement, découverte, émerveillement dans l’expérience directe de leur visibilité et de leur expression de tendresse. »
« Formés à l’image de Dieu comme communion de personnes, l’homme et la femme sont appelés à manifester l’Esprit quand ils s’unissent, de manière à former “une seule chair” ». Ainsi ils peuvent “Glorifier Dieu dans leur corps !” (1 Co 6, 20). »