Les démons existent-ils vraiment ?

démon - possédé

Un homme possédé par un démon – c’est le cas du pseudo-thaumaturge qui apparaît dans la saison 1 de “The Young Pope/The New Pope” – dit voir la Sainte Vierge . . . Mais alors, les démons existent vraiment ?

Pour vous aider à y voir plus clair : une réponse tirée du livre du Père Jean-Régis FROPO (et librement adaptée) : “90 questions à un exorciste

UN MONDE INVISIBLE

Avec l’Évangile nous devons reconnaître qu’un monde invisible peuplé d’anges et de démons existe réellement, même si nos sens ne les perçoivent pas !

Dieu a donné l’existence à diverses espèces de créatures : le cosmos matériel, les être vivants, végétaux et animaux, et enfin l’homme « fait à son image » (La Bible, Genèse 1,27) à la fois corps et esprit. Il l’a établi souverain de toute la Création. Mais Dieu a également fait des créatures purement spirituelles invisibles à nos yeux de chair : les anges.

Ils ont une intelligence et une volonté libre comme nous. Ils sont capables, de connaître et d’aimer en esprit.

Dans la prière du CREDO  les catholiques proclament d’ailleurs que Dieu est « Créateur du monde visible et invisible ».

Il semble en effet logique que si Dieu a créé des éléments purement matériels. Il a également créé des êtres purement spirituels. «La perfection de l’univers exige qu’il y ait des créatures spirituelles.» (Saint Thomas d’Aquin – 1225-1274)

J’approfondis : Le CREDO c’est quoi ?

Un univers invisible ! Il y en a vraiment qui y croient ? Je veux en avoir le cœur net, j’utilise le chat’ !

ET LES DÉMONS ALORS ?

Les démons sont des anges rebelles. Ils ont refusé radicalement et irrévocablement Dieu et son Règne d’amour. Ils sont devenus mauvais.

Il leur est possible de communiquer entre eux. La société des démons est hiérarchisée. Ils ne sont pas tous égaux et semblent avoir chacun une spécialité : les impurs, les  menteurs, les jaloux, etc (enfin tout ce dont l’âme humaine peut être tourmentée).

Mieux encore, les démons ont une connaissance des réalités matérielles et de chaque objet en sa singularité. Ils ont certes une vision  de l’avenir, mais très partielle. Par exemple, ils ne voient pas le futur au sens où on le dit de Dieu qui sait tout de toute éternité, mais ils l’appréhendent par les causes, par conjecture. Il est vrai qu’ils connaissent les causes plus parfaitement et universellement que nous.

J’approfondis : Les neuf chœurs des anges

Donc ? Je veux en avoir le cœur net, j’utilise le chat’ !

ET DANS LE MONDE VISIBLE ?

Satan – qui avant sa chute était le plus beau de tous les anges – ne supporte pas que les hommes aient accès à l’éternité bienheureuse promise par Dieu, qu’il a lui-même perdue (1). Aussi, avec ses troupes de démons  agit-il parmi les hommes. Il cherche par tous les moyens à les entraîner dans sa révolte.

Les démons n’ont pas directement accès à nos pensées les plus intimes. Seul Dieu les connaît ! Cependant, par nos paroles, nos gestes, les expressions du visage et du corps, l’intime de nos cœurs peut être en partie découvert. Les démons peuvent ainsi percevoir avec une grande pénétration ces effets extérieurs. Il peuvent en déduire une part de nos pensées et agir en conséquence pour nous tenter et parfois même, si nous leur ouvrons trop la porte de nos cœurs, nous posséder.

Mais heureusement nous ne sommes pas seuls !

J’approfondis : L’ Ange Gardien

Donc les exorcismes ce n’est pas que dans les films ? Je veux en avoir le cœur net, j’utilise le chat’ !

 

  • Pour aller plus loin :

90 questions à un exorciste – Thérapeutiques des emprises maléfiques” – Jean-Régis FROPO – Pour se le procurer

Tactiques du diable – Lettre d’un vétéran de la tentation à un novice– C.S. Lewis – Pour se le procurer

(1) Cf. Catéchisme de l’Église catholique (CEC), n° 391 à 395.

Le pape prend-il ses vacances à Venise ?

Dans la série The New Pope, on voit le pape se balader en maillot de bain sur une plage de Venise, entourée de belles jeunes femmes peu habillées qui jouent au volley… Mais le pape prend-il ses vacances à Venise dans sa maison de vacances ?

Bien sûr que non : sans allusion aucune à toute polémique sur le célibat des prêtres, le pape a choisi de donner entièrement sa vie à Dieu, sans retard, sans retour et sans… restriction. Aussi, il n’a pas spécialement envie d’aller se balader en maillot de bain papal – qui ressemble plutôt ici à un vulgaire slip – sur une plage huppée de la Reine de l’Adriatique ou ville des amoureux, allias Venise…

Un pape jamais en vacances

Le pape François, on le sait, n’aime pas les vacances, et s’il doit se reposer, il se limite, contraint et forcé, à annuler quelques rendez-vous. En dehors des déplacements pontificaux, il reste toujours dans son petit appartement de la maison Sainte-Marthe où il a élu domicile depuis son élection, pour ne pas avoir à habiter le palais apostolique officiel, « trop grand et trop fastueux » pour lui.

Vue arérienne de Castel GandolfoD’ailleurs, le pape François a décidé, trois ans à peine après son élection, de ne plus profiter de la résidence d’été des papes, Castel Gandolfo, pour vivre un été plus sobre, renonçant ainsi définitivement à aller s’y reposer comme faisaient tous ses prédécesseurs et mettant fin ainsi à une tradition de plus de 420 ans ! Dès son élection, il avait fait ouvrir aux touristes les magnifiques jardins de ce bel écrin légèrement moins chaud que Rome en été, car situé en hauteur. Il a donc aussi ouvert aux publics les prestigieux appartements, de la même façon qu’il n’habite plus les appartements pontificaux.

Lire aussi : comment déjeune le pape ?

Jardins du pape - Castel GandolfoSi le pape François a patienté un peu avant d’ouvrir au public l’intégralité de ce magnifique espace chargé d’histoire, c’est qu’il voulait laisser le temps au pape émérite Benoît XVI, retiré à Castel Gandolfo depuis sa renonciation au trône de Pierre, de s’installer au petit monastère Mater Ecclesiae, dans les jardins du Vatican, qui avait besoin de gros travaux…

La longue histoire de Castel Gandolfo

Acquis par le Saint-Siège en 1596 en rémission d’une dette des Gandolfo-Savelli sous le Pape Clément VIII, le château était devenu résidence d’été des papes en 1626, sous le pontificat d’Urbain VIII (1623-1644). Les papes Pie XII et Paul VI y moururent en 1958 et 1978. Jean XXIII et Jean Paul II y séjournaient chaque été pour fuir la chaleur romaine (ce dernier appelait malicieusement les lieux « Vatican II »).

Bureau du pape - Castel Gandolfo
Bureau du pape – Castel Gandolfo

Cependant, le pape François ne reste pas reclus au Vatican comme un ermite. A la maison Sainte-Marthe, il déjeune souvent avec le personnel, invite même les pauvres de Rome, reçoit beaucoup. « Je ne peux pas vivre seul entouré d’un tout petit groupe de personnes. J’ai besoin de vivre avec des gens, de rencontrer des gens », a-t-il toujours dit.

 

Un domaine chargé d’histoire qui fait désormais partie des Musées du Vatican

Chambre du pape - Castel Gandolfo
Chambre du pape – Castel Gandolfo

Le domaine de  cinq hectares de nature et d’art  abrite plusieurs villas comme la magnifique villa Barberini ou encore celle de l’empereur Domitien, dernier empereur de la dynastie des Flaviens, avec une vue imprenable sur le lac d’Albano, près de Rome. Accueillant une petite ferme, le téléscope de l’Observatoire du Vatican et doté de l’électricité dès 1934, le domaine abritera à partir de 1943 plus de 3000 juifs fuyant les persécutions. Mais rien à voir avec le Pie XIII de la série The New Pope !

 

 

Pour aller plus loin :

Le pape fait-il des slams dans la foule ?

Pie XIII (Jude Law)

Dans The New Pope, on voit le pape Pie XIII faire un magnifique slam dans la foule, tel un festivalier des Vieilles charrues ou du Hellfest. Alors, le pape fait-il des slams dans la foule, hein ?

On est bien loin de la réalité. L’absence de drapeaux bretons rend déjà la scène irréaliste : dans tout festival qui se respecte, il y en a forcément un (bien qu’il n’y ait toujours pas d’explication scientifique à la chose).

Maintenant, est-ce qu’un pape slam dans la foule ? D’après les archives secrètes du Vatican, aucun pape ne l’a encore fait. Il faut dire que la hauteur du balcon des appartements pontificaux, qui donnent place Saint Pierre, rendrait le geste très dangereux, surtout s’il est exécuté par une personne âgée pas assez entraînée (le pape actuel a 83 ans).

Précisons que ces appartements ne sont plus habités par le pape François, qui leur préfère un petit hôtel du Vatican moins somptueux appelé Sainte Marthe. (Lire aussi : comment déjeune le pape ?)

Quand au balcon de la basilique Saint-Pierre, il est lui aussi beaucoup trop haut : environ 30 mètres. Imaginez un peu, ce serait un vrai crash…

Balcon Basilique Saint-Pierre-de-Rome

De plus, le service de sécurité du pape ne serait pas vraiment d’accord : les gardes suisses seraient obligés de slamer dans la foule eux aussi, or slamer avec une hallebarde pourrait blesser quelqu’un du public. (Il y a bien aussi des services de secours comme l’Ordre de Malte présents place Saint-Pierre, mais quand-même.)

Sans compter que l’uniforme de jour des gardes suisses n’est pas le plus adapté pour cette action : s’ils doivent le faire parce qu’un pape un peu loufoque voudrait quand-même tenter un slam, nous leur conseillons l’uniforme d’exercice qui sert aussi au service de nuit :

Pour aller plus loin : tout savoir sur les gardes suisses

Les cathos aiment-ils The New Pope ?

The New Pope

Les cathos aiment-ils The Young Pope / The New Pope ? Pourquoi les médias chrétiens en parlent-ils si peu ? Boude-t-elle la série d’HBO-Canal+, ou bien… ? Quelles sont les retombées presse de ce côté-là ? Les cathos regardent-ils la télé ou sont-ils du siècle dernier ?

Un sentiment mitigé

Le sentiment global est plutôt mitigé, dirons-nous. L’hebdomadaire Famille chrétienne avait publié une critique de la saison 1 qui s’intitulait (à juste titre ?) Souverains poncifs. Ils fustigeaient une “représentation captieuse, fallacieuse de l’Église” : “Bienvenue au royaume de la caricature et de la provoc ! Le Vatican ? C’est Dallas…” A l’époque, Pèlerin Magazine décrivait Pie XIII comme un pape “imbu de lui-même, vitupérant, cassant, autoritaire et caractériel”. Pour la saison 2, ils se sont tu : un silence très élogieux. Comme d’ailleurs beaucoup d’autres médias catholiques…

Le grand écart

En revanche, du côté de l’hebdomadaire La Vie, sous la plume de Marie Lucile Kubacki, on est dithyrambique. Pas moins ! On cautionne ainsi “une grande série“, “une oeuvre poétique et profonde“, et même “une plongée métaphysique…” : rien que ça ! Sérieusement ? Bah oui…

Citons cet article in extenso :Paolo Sorrentino signe plus qu’une grande série sur les arcanes du pouvoir au Vatican, une œuvre poétique et profonde sur le mal et le combat spirituel. Une plongée métaphysique dans les abîmes de l’âme humaine, haletante comme un thriller, servie par des plans soignés et un casting de rêve : outre John Malkovitch, Jude Law, Silvio Orlando et Ludivine Sagnier, déjà cités, on retrouve Cécile de France, Sharon Stone et Marylin Manson, qui rivalisent de charme et de drôlerie…

Bon, pour la drôlerie, il faudra en reparler : d’ailleurs, quelle différence entre humour et dérision ? La journaliste en poste à Rome évoque tout de même du bout du lèvres que “certaines scènes sont choquantes” (quand on sait qu’un communiqué du diocèse de Venise parle de profanation…), “mais, ajoute-t-elle, les provocations même les plus délirantes de Sorrentino contiennent des questions qui sonnent très juste.” Ah, nous voici rassurés !

Beaucoup de questions sans réponses

Et le journal d’en faire la judicieuse liste :

– Un pape qui ne peut plus exercer son ministère car il est dans l’incapacité de le faire – à l’instar de Pie XIII, en coma à durée indéterminée – cesse-t-il absolument de l’être ?
– Quelle est la frontière entre le péché et la corruption ?
– Dieu « aime-t-il » certains papes plus que d’autres ?
– Qu’est-ce que l’idolâtrie (dans la première saison, Pie XIII refusait les photos et les objets à son effigie, ce qui n’a fait que décupler la fascination pour sa personne) ?
– Faut-il des saints pour gouverner l’Église ?
– Quel est le prix spirituel des nécessaires aménagements diplomatiques et politiques dans la gouvernance de l’Église ?
– Dans quelle mesure le pape doit-il faire de la politique ?
– Jusqu’à quel point un saint peut-il être un grand pécheur ?

Nous tâcherons donc de répondre patiemment à toutes ces questions qu’elle (se) pose. Et qui c’est vrai, méritent d’être abordées  : mais avait-on besoin d’une telle série pour cela ?

En attendant, nous vous proposons ces questions un peu plus terre-à-terre :

Cependant, The New Pope peut donner l’occasion à de nombreux catholiques de témoigner de leur foi en Jésus-Christ, car comme le disait le premier pape de l’Eglise, Saint Pierre, dans sa première lettre apostolique (*) : “Soyez toujours prêts à rendre compte de l’espérance qui en vous, faites-le avec douceur et respect”.

(*) La Bible, première lettre de Saint Pierre chapitre 3, verset 15.

Le pape voyage-t-il à genoux ?

Jude Law, un pape (Pie XII) qui prend l'avion...

Dans la série The Young Pope/The New Pope, le pape Pie XIII (rien à voir avec Pie XII) voyage à genoux. Pire : il y aurait une classe en dessous de la classe économique, où il n’y a même pas de siège mais un simple coussin… ou tapis ? Alors, qu’en est-il vraiment ?

Nous nous sommes renseignés auprès de la Secrétairerie d’Etat de la Cité du Vatican, pardon, non, du Saint-Siège (lire aussi : le Vatican et le Saint-Siège, c’est pareil ?), pour tirer tout cela au clair. En effet, c’est une affaire plus que supprenante de voir le pape voyager à genoux, qui plus est en priant ! (Bien sûr, pour les catholiques, il n’est pas interdit de prier quand on voyage… ni de voyager quand on prie, mais quand-même).

Démenti officieux

Après avoir fait sonner les portables, nous avons donc eu la confirmation du contraire : le pape voyage en réalité soit débout, soit assis. Tout simplement. En voici les preuves…

Sur cette image, on voit bien que le pape voyage assis :

Voici une autre image dans laquelle il voyage debout :

Parfois, il lui arrive même d’assister les pilotes (peut-être a-t-il eu son brevet d’aéronautisme quand il était ado ?) :

Autre précision incroyable : le pape a même son bagage en cabine ! Et n’a pas de jet privé, le Vatican n’étant pas aussi riche qu’on le croit parfois… (lire aussi : Le Vatican est-il riche ?).

Alors voilà, non seulement nous avons les preuves, mais en plus, un expert en sécurité aéronautique affirme que lors du décollage, cette position à genoux n’est pas autorisée par les procédures en vigueur dans l’aviation civile, d’autant que le coussin ne possède pas non plus de ceinture de sécurité. Et comme le pape est très respectueux de la législation, il respecte aussi cette règle-là…

“De fait, pour le moment la classe la plus  basse c’est la classe éco, or dans cette classe, chaque passager a bien un siège attitré”, précise ce spécialiste des voyages papaux. Un autre expert, spécialiste des genoux celui-là, affirme que “cette position n’est pas à garder durant la totalité d’un vol Paris-New-York, et ce même si on porte des bas de contention”. Et comme le pape est très respectueux du corps que Dieu lui a donné, il est aussi très respectueux de la médecine…

Un pape, ça voyage toujours beaucoup…

De fait, un pape, ça voyage beaucoup ! Si on prend par exemple Jean-Paul II, il est passé par 130 pays (sur les 191 que compte la planète), il a parcouru plus d’un million de kilomètres et visité près de 900 villes, ce qui n’est pas rien. D’ailleurs, selon les statistiques du Vatican, Jean-Paul II a ainsi effectué un peu plus de trois fois la distance entre la Terre et la Lune, ou encore près de 30 fois le tour de la Terre ! Il aurait même pu voyager en fusée ou en navette spatiale ! Et oui ! Enfin, si l’on compte ses nombreux déplacements en Italie (près de 150), le pape de la nouvelle annonce de la Bonne Nouvelle (*) a été absent presque trois ans du Vatican… loin de la vision véhiculée par la série The Young Pope / The New Pope, où le pape se la coule douce en buvant du Coca Zéro à la cerise ou en jouant au billard

Pour aller plus loin :

 

(*) pour ne pas dire nouvelle évangélisation, qu’on pourrait confondre à tort avec du prosélytisme…

Le pape joue-t-il au billard en fumant sa clope ?

Lenny Belardo dit Pie XIII (Jude Law) dans la Série The Young Pope

Oui, bien sûr, il en fume même 12 par jour, comme les apôtres ! 😉 Bon en fait, il ne faut pas se leurrer, une vie de pape n’est pas vraiment – voire même pas du tout – comme dans The Young Pope / The New Pope, où le Saint-Père fume sa clope tranquillement en jouant au billard avec son Coca à la cerise (véridique !) et décide de tout comme un chef maffieux…

Ceci est une vision déformée de la réalité. Mais bon, qui a dit que les séries à succès étaient toujours les plus réalistes ? 😉

Il faudrait déjà, avant toute chose, que le pape fume. Or, ce n’est pas le cas du cas actuel, François, à qui il manque un poumon. C’est d’ailleurs pas très sympa d’avoir représenté un jeune pape qui fume alors que le nôtre est déjà assez âgé et ne peut plus cloper !

Ensuite, il faudrait aussi que le pape joue au billard. Or cela n’est pas confirmé par la Secrétarie d’Etat. Il n’y en a d’ailleurs pas au Vatican, du moins à notre connaissance, car les caves vaticanesques renferment sans aucun doute de nombreux secrets cachés au commun des mortels que nous sommes…

C’est un peu comme le fait que le pape sache ou non jongler : ce n’est pas impossible, bien sûr, mais qui connaît la vérité ? Le plus simple serait de lui demander au cours d’une audience papale ou lors de sa catéchèse place Saint Pierre, lorsqu’il s’aventure dans la foule…

Enfin, il faudrait encore que le pape soit très mal élevé pour fumer au-dessus d’un billard : ça coûte une blinde de refaire le tapis si une cendre encore allumée le perce !

En revanche, ce qui est absolument certain, c’est que l’Eglise catholique n’a rien d’une maffia dont le pape serait le chef, pas plus que l’Eglise n’est une ONG à laquelle on cotise (dixit François), ni encore moins une secte qui a réussi.

Non, vraiment, la seule fumée que le pape connaisse bien, c’est la blanche qui l’a vu élire.

Pour aller plus loin :

Souverains poncifs

The_Young_Pope-PieXIIIAlors que The Young Pope débarque sur HBO Canada, nous publions enfin l’avis de l’hebdomadaire catholique Famille chrétienne.  Retour sur The Young Pope, la série choc qui brosse une représentation captieuse, fallacieuse de l’Église.

Le moins qu’on puisse dire, c’est que Canal+ ne s’est pas empressé de nous communiquer les épisodes (envoyés au compte—gouttes alors que la diffusion touche à sa fin) de sa série culte. Les premiers seront les derniers. Famille chrétienne livre donc in extremis ses impressions sur une production qui lui était a priori toute destinée. La chaîne cryptée a eu du pif : cette saga satirique sur l’Église catholique écope d’un triangle, la peine maximale dans notre échelle de cotation, que ni les rares idées conformes à l’enseignement de l’Église, ni la qualité de la réalisation, ni la somptuosité des décors ou le prestigieux casting loués par les critiques ne parviennent à contrebalancer.

Bienvenue au royaume de la caricature et de la provoc. Le Vatican ? C’est Dallas. Un univers impitoyable où fourmillent des cardinaux arrivistes, intrigants, aux mœurs peu reluisantes, et mal intentionnés à l’égard du jeune cardinal américain qu’ils viennent d’élire, certains de pouvoir le manipuler. Bien mal leur en prend. Car Pie XIII (Jude Law) a du caractère. Autoritaire, méprisant, un brin sadique et vaniteux, le « Saint-Père » tourne en rond clope au bec dans ses appartements, ruminant ses mauvais coups plus que ses futures encycliques.

Lire aussi : le pape joue-t-il au billard en fumant sa clope ?

Il prie peu ou de façon outrancière, répète à l’envi qu’il ne croit pas en Dieu, promet la pourpre cardinalice à qui violera le secret de la confession. Certes. le Vatican n’est pas un club de chérubins, mais enfin…
Au fil des épisodes, toutefois, son regard démoniaque s’adoucit, les scènes trash se raréfient. Tiare vissée sur la tête, « Sa Sainteté » n’hésite pas à fustiger l’individualisme de ses ouailles et à condamner l’avortement. Oui, car c’est le portrait d’un pape réac, soucieux de renouer avec les traditions de l’Église préconciliaire que le réalisateur Sorrentino dit avoir dressé.

Lire encore : le pape sort-il souvent d’une piscine tout habillé ?

Un pape incarnant « le germe d’un fondamentalisme catholique que nous excluons a priori, tout comme, il y a cinquante ans, nous aurions exclu le risque d’un fondamentalisme islamique ». Pas moins. Sorrentino, lanceur d’alerte, le Snowden de la catholicité. C’était donc ça ? Alors, disons que l’enfer est pavé de bonnes intentions.

Élisabeth Caillemer

Pour aller plus loin :

L’Eglise est-elle une secte qui a réussi ?

Pour certains, l’assimilation de l’Église à une secte est une erreur grossière ; pour d’autres, au contraire, l’équivalence s’impose. Dans la première saison de The Young Pope / The New Pope, vu les comportements du pape Pie XIII, on se le demande sérieusement, notamment pour les interférences entre ses confessions et son gouvernement de l’Eglise… Alors, l’Église serait-elle une secte qui a réussi ? La réponse du cardinal Philippe Barbarin, archevêque de Lyon et primat des Gaules – qui a voté au précédent conclave, mais pas pour Pie XIII – extraite du livre 100 questions sur l’Eglise dirigé par Emmanuel Pisani.  

Emmanuel Pisani : L’Eglise propose-t-elle une définition du mot secte ?

Cardinal Philippe Barbarin : C’est un mot piégé car il a une connotation extrêmement négative. Si on l’identifie à des critères objectifs comme la capacité à pouvoir disposer de son temps, de son corps ou de son argent, alors on risque fort de conclure que les religieux qui font vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance sont manifestement entrés dans une secte.
À mes yeux, ces critères sociologiques ne sont donc pas suffisants. Ils ne sont pas assez affinés car ils ne tiennent pas compte des motivations spirituelles qui déterminent le choix des jeunes dans l’accomplissement de leur vocation.
En s’appuyant sur des critères uniquement sociologiques, on méconnaît la puissance de la charité, d’un amour de feu capable d’aller jusqu’à la folie. Lorsqu’un homme dit à sa femme : « Tout ce que je suis est à toi; mon corps est à toi, mon argent est à toi. Tout mon amour, tout mon cœur, je te les donne, nous faisons une seule chair, parce que Dieu nous a unis », peut-on en conclure que leur mariage est vécu comme une aliénation ? Si ce mariage est vécu dans la ligne de ce qu’enseigne l’Évangile, comme une offrande d’amour et un acte de Dieu en eux, il n’est pas question d’« aliénation » mais de don de soi à l’autre.
Il faut bien voir que c’est la même logique d’amour et de don de soi qui est à l’œuvre lorsqu’une jeune femme ou un jeune homme désire consacrer leur vie à Dieu.

E.P. : Du point de vue étymologique, le mot secte vient du latin secare qui signifie « couper ». En ce sens, il est vrai que le christianisme « s’est coupé » du judaïsme. N’est-il pas alors une secte juive ?

P.B. : À l’époque de Jésus, certains juifs ont reconnu en lui le Messie qui devait venir. D’autres ont vu en lui un imposteur. Il s’en est suivi une cassure et la naissance d’un groupuscule que l’on a nommé les Nazoréens (cf. La Bible, Actes des Apôtres, 24, 5 et 14). Toute la question est de savoir pourquoi ce groupuscule a réussi. Or il a réussi parce que ses membres avaient un dynamisme, un panache ou plutôt un charisme extraordinaire. Saint Paul, malgré sa fragilité, avait une énergie et une foi à déplacer les montagnes. Relisons l’argumentation de Garnaliel dans le livre des Actes des Apôtres. Le contexte historique est celui de la condamnation des disciples de Jésus, mais Garnaliel avertit les membres du Sanhédrin (Assemblée législative traditionnelle d’Israël et son tribunal suprême, ndlr.) :

« Hommes d’Israël, faites bien attention à la décision que vous allez prendre à l’égard de ces hommes. Il y a quelque temps, on a vu surgir Theudas. Il prétendait être quelqu’un et quatre cents hommes environ s’étaient ralliés à lui. Il a été tué et tous ses partisans ont été mis en déroute et réduits à rien. Après lui, (…) on a vu surgir Judas le Galiléen qui a entraîné derrière lui une foule de gens. Il a péri, lui aussi, et tous ses partisans ont été dispersés. Eh bien, dans la circonstance présente, je vous le dis, ne vous occupez plus de ces gens-là, laissez-les. Car si leur intention ou leur action vient des hommes, elle tombera » (Actes 5, 35-38).

Au fond, maintenant que Jésus est mort, il va de soi que l’action de ses disciples va perdre en intensité, elle va s’essoufler d’elle—même. Et Gamaliel énonce l’argument décisif à ses yeux :

« Si leur action vient de Dieu, vous ne pourrez pas les faire tomber. Ne risquez pas de vous trouver en guerre contre Dieu » (verset 39).

Quand on se demande si l’Église est une secte qui a réussi, il faut s’interroger sur ce verbe réussir : dans la bouche de Gamaliel, qui n’est pas très courageux mais cependant inspiré par la foi, « une secte qui a réussi », c’est un groupe qui a commencé comme ceux de Theudas ou de Judas le Galiléen, mais qui a fini par durer, franchir les obstacles. Il y a dans cette réussite une expression de la volonté de Dieu.

Pour Gamaliel, les événements parlent deux-mêmes, ils disent a posteriori que l’Église n’est pas une secte. Puisque l’annonce de Jésus comme Messie, Maître et Sauveur s’est répandue dans le monde entier, il est une conséquence qui s’impose à nous : cette communauté est voulue par Dieu.

Le cardinal Voiello (Silvio Orlando) dans The Young Pope
Le cardinal Voiello (Silvio Orlando) dans The Young Pope / The New Pope : l’homme cet homme fait-il partie de la mafia-secte vaticanesque ?

E.P.: Lorsque l’on parle de secte, on imagine non loin un gourou qui exerce un pouvoir psychologique fort et qui manipule les adeptes du groupe. Vous nous parliez du panache de Saint Paul. Le panache de Jésus qui attire à sa suite les douze apôtres n’est-il pas une forme de magnétisme qui peut rappeler celui des gourous ?

P.B.: Il est sûr que Jésus avait un impact psychologique sur ceux qui le côtoyaient. Il était fascinant, il attirait à lui les foules et les interpellait :

« Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau » (Evangile de Matthieu, 11, 28)

L’aura et le rayonnement de Jésus sont indéniables même s’ils ne suffisent pas à rendre compte de son oeuvre. Aujourd’hui, si l’on assistait à une scène comme celle de l’Evangile de Jean 7, 37: « Au jour solennel où se terminait la fête, Jésus, debout, s’écria : “Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive, celui qui croit en moi!” », on l’accuserait de manipuler les foules.

Et pourtant, ce serait un peu rapide ! Bien d’autres hommes ont un charisme extraordinaire, par exemple des hommes politiques ou des artistes, sans être pour autant considérés comme des gourous. Rappelez—vous : quand vous étiez élève ou étudiant, vous avez été fasciné par certains professeurs qui vous ont réconcilié avec leur discipline ou peut-être même vous ont passionné pour elle. Je crois que le charisme qui apporte la lumière à une intelligence et la joie à un cœur n’a rien de mauvais. Toute la question est de savoir si l’on fait bon usage de ce charisme. Est-on en train d’assujettir une personne, de mettre la main sur elle pour se l’approprier ? Ou au contraire, l’aide-t-on à trouver le chemin de sa liberté, à se mettre dans la main de Dieu pour déployer toutes ses richesses ? Regardez saint Bernard entraînant ses amis et plusieurs membres de sa propre famille dans la générosité de sa vocation: son but était de les mettre tous dans la main de Dieu. La grande difficulté pour les chrétiens, lorsqu’ils veulent dialoguer avec la société civile, c’est que celle-ci pratique une analyse des fonctionnements sociaux ou psychologiques en faisant abstraction de toute dimension spirituelle.

E.P.: Certes, mais cet argument pourrait aussi être tenu par Gilbert Bourdin, le fondateur de la secte du Mandaron, ou encore Claude Vaurillon, le fondateur du mouvement des Raëliens!

P.B.: On doit mentionner ici le rôle de l’Église. Les fondateurs ne sont pas seuls, sans régulation. Il y a les évêques, et le pape, successeur de Pierre (— même si, bon, dans The Young Pope, on ne confierait pas à Pie XIII un tel discernement… -ndlr). Ainsi, lorsque saint François, que nous qualifierions aujourd’hui de charismatique, entraîne de jeunes frères derrière lui, obéissant à l’Église, il va rencontrer le pape Innocent III et se soumet à son jugement. Cela signifie que l’Église exerce un discernement. Par exemple, une « boule de feu » comme sainte Thérèse d’Avila devra attendre près de vingt ans avant de pouvoir réformer le Carmel, parce que tout le monde était contre elle. Convaincue qu’elle avait reçu un appel de Dieu, elle a dû en retarder la réalisation et faire preuve de patience. Il est clair qu’elle a exercé l’influence de ce que l’on appellerait aujourd’hui un gourou, mais elle est toujours restée dans l’obéissance à une norme qui était au-dessus d’elle. Tel n’est pas le cas, par exemple, du Mandaron, ni de Raël, ni de Moon, qui sont, pour eux—mêmes, la norme suprême.

  • Pour aller plus loin : se procurer le livre 100 questions sur l’Eglise, via Amazon

Quelle musique Dieu écoute-t-il ?

La première image de la série The Young Pope

Première image officielle de la série The Young Pope / The New Pope (photo ci-dessus) : on se demandait si le pape Pie XIII n’était pas en train d’écouter de la musique…

La bande-son électro-rock de la série The Young Pope / The New Pope fait l’unanimité et apporte beaucoup au rythme de la série. Pie XIII, d’ailleurs, qui cite cite Daft Punk, aime beaucoup écouter de la musique : lorsqu’une ministre d’un pays scandinave lui offre un vinyle, il s’empresse de demander à l’écouter… Contrairement à ce qu’on pourrait penser, d’ailleurs, les papes peuvent tout à fait être musiciens (Benoît XVI jouait du piano). Et Dieu, quelle musique écoute-t-il ? La réponse de Paul Clavier, philosophe normalien, dans son livre 100 questions sur Dieu.

Selon une légende propagée par le théologien suisse Karl Barth, Dieu, sur son trône, écoute (religieusement) les cantates de Jean—Sébastien Bach, interprétées par le chœur et l’orchestre des anges du paradis. Mais lorsque les anges sont entre eux, au cours des répétitions, ils se mettent à jouer du Mozart, et Dieu écoute à la porte.

Cet apologue traduit une intuition sur la personnalité de Dieu, très révélatrice de nos attentes humaines. En public, Dieu aime la majesté, la gloire, la solennité. En catimini, il goûte la frénésie mélancolique de Wolfgang… Amadeus. D’un côté, nous reconnaissons aisément la grandeur et la puissance de Dieu, et seule une « grande » musique semble alors à la hauteur. Mais nous tenons également à un Dieu sensible, capable de s’attendrir.

Nous imaginons sans peine Dieu à l’aise dans le Messie de Haendel et dans le chœur final de la « Neuvième symphonie » de Beethoven, où il est d’ailleurs évoqué sans détour :

« Frères, par-delà la tenture des étoiles doit habiter un père chéri. Vous prosternez-vous, milliards de créatures ? Monde, pressens-tu ton Créateur ? »

On peut également penser à la « Neuvième symphonie » de Bruckner, dédiée à Dieu, et qui propose un véritable trip métaphysique à l’auditeur emporté vers des horizons mystiques. Mais pourquoi Dieu ne se réjouirait pas d’une simple comptine qui chante la vie, les saisons, l’amour ou la nature ? Il n’est même pas exclu que Dieu aime la musique métal, à condition toutefois qu’elle célèbre l’énergie de la création, et non le plaisir douteux de la destruction.

Conclusion : c’est pareil pour The Young Pope / The New Pope, Dieu peut aimer la bande-originale, à condition toute fois qu’il ne s’agisse pas se servir l’entreprise de destruction massive d’un pseudo-pape Pie XIII revanchard et sournois, pour ne pas dire pervers… Allez, on vous met un lien vers la playlist de la BO de The Young Pope.

 

Pour aller plus loin :

Humour et dérision, quelle différence ?

Le pape Pie XIII, dans The Young Pope, reçoit un kangourou en cadeau. Il le libère dans les jardins du Vatican… humour, ou dérision ?

Dans la série The Young Pope, on a souvent bien du mal à distinguer ce qui est drôle de ce qui est de la dérision à l’encontre de l’Eglise, du pape et des catholiques. C’est particulièrement le cas pour l’attitude « machiavélique, vitupérante, cassante, autoritaire, caractérielle » de Pie XIII, pour reprendre les mots du magazine Pèlerin. Alors, peut-on rire de tout ? Quelle est la différence entre humour et dérision ? La réponse du Père Guy Lescanne, théologien et sociologue, librement tirée et adaptée de son livre Petit vocabulaire de Dieu paru aux Editions Salvator.

Peut-on rire de tout ?

Pour ne pas trop vite répondre en me laissant enfermer dans l’air du temps, je formule une première hypothèse : n’y aurait-il pas aujourd’hui trop de dérision… et pas assez d’humour ?

Je ne joue pas sur les mots, surtout quand je pressens qu’il est un mot qui a un bon goût de Dieu, et un autre qui a le mauvais goût du Malin. Il me semble, en effet, que nous soufrons aujourd’hui d’une trop grande confusion entre humour et dérision. Une telle confusion peut être grave. Quand tout peut, d’une manière ou d’une autre, être objet de dérision, il est bien difficile de vivre ensemble.

Qu’il est difficile, pour ne citer que deux exemples, d’oser nouer des relations simples et vraies ou encore de s’exposer dans une prise de responsabilités, quand de telles attitudes font trop systématiquement l’objet de railleries… On peut le vérifier bien souvent, trop souvent, dans notre société médiatique. Mais ce peut être vrai aussi dans l’Église du Christ.

Humour et dérision, deux faux frères

Beaucoup de jeunes, entre autres, sont très vulnérabilisés dans leur capacité à prendre des responsabilités, par cette confusion entretenue entre ces deux « faux frères » que sont l’humour et la dérision, confusion qui menace de freiner, voire de paralyser, bien des engagements. Quel jeune va pouvoir aujourd’hui envisager sereinement de s’engager dans le domaine politique – par exemple – quand la moquerie, dans les médias et ailleurs, vient jeter la suspicion sur toutes celles et ceux qui prennent de telles responsabilités ? (— Y compris au Vatican, ndlr.)

On pourrait poser la même question, pour les vocations, sur les conséquences d’une trop fréquente dérision médiatisée sur l’Eglise en général, et sur les religieuses, les religieux et les prêtres en particulier. Ici comme ailleurs l’humour pourrait faire le plus grand bien, alors que la dérision fait le plus grand mal.

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Le t-shirt de soeur Mary, bras droit du pape, porte l’inscription “je suis vierge mais c’est un vieux t-shirt”. Humour… ou dérision ?

Des points de repère

Je me permets alors de proposer tout d’abord quelques points de repère pour mieux faire la distinction entre l’humour et la dérision et — pourquoi pas ? — mieux réagir.

L’humour instaure ou favorise une prise de distance critique. L’humour est critique, non au sens de dénigrement, mais de discernement. Il invite à voir plus grand et plus loin. Il réussit à marier bienveillance et lucidité. Dans un sens, il est profondément juste, car, avec le sourire, il met chacun à sa place.

C’est ainsi qu’il vise au moins autant celui qui le manie (l’auteur d’un propos plein d’humour), que celui qui le reçoit (son destinataire), et que celui qui en est l’objet (sa cible). L’humour appelle le plus souvent à une saine humilité. En ce sens, les meilleures blagues sont souvent celles où l’on est en capacité de rire de soi-même !

Finalement, nous venons tous de l’humus, tel Adam le terreux. Aujourd’hui comme hier, je suis convaincu, en effet, qu’en nous rappelant que nous sommes humains, l’humour contribue à nous humaniser. Nous manquons vraiment trop souvent d’humour ! Bienheureux ceux qui savent rire d’eux—mêmes, ils n’ont pas fini de s’amuser ! L’humour est plaisant, et il lui arrive même d’être profondément humanisant.

Quitte à me voir reprocher de ne pas être assez « large », de manquer d’ouverture et d’avoir bien des œillères, je poursuis en affirmant que la dérision n’est sûrement pas à mettre à la même enseigne. C’est même l’inverse. En effet, la dérision cherche d’abord l’humiliation de celui, de celle ou de ceux qu’elle vise. La dérision abaisse sa victime. Elle traîne sa proie « plus bas que terre », en lui faisant « mordre la poussière ». La dérision est déplaisante. Et il lui arrive même d’être profondément déshumanisante. Si l’humour permet de prendre de la distance, ne serait-ce qu’en nous permettant de ne pas nous prendre trop au sérieux, la dérision produit l’effet contraire. Elle colle à la peau de celui qu’elle prend comme souffre-douleur.

Je soutiens que la dérision interdit toute prise de distance en enfermant les personnes dans l’ironie. Elle est vite complice du mépris. Elle est souvent cynique. Pensons, par exemple, à certains propos blessants que l’on peut tenir sur des groupes de personnes d’une autre culture ou d’une autre religion… ou même d’une autre « sensibilité religieuse » au sein d’une même Eglise, alors même que les personnes incriminées ne sont pas là pour se défendre, ou pas assez « en force » pour réagir devant un auditoire habilement monté contre elles. (— Nous pensons ici à la puissance médiatique des séries TV face aux petites minorités créatives que nous sommes : c’est un peu David contre Goliath, ndlr.)

Je pense, entre autres ici, aux mauvaises blagues explicitement, ou pire, insidieusement racistes contre les juifs, les musulmans (— on pense aux caricatures sur Mahomet, ndlr) ou bien d’autres.

Il me semble qu’il est un peu facile alors de ne faire porter le chapeau qu’aux médias. Nous avons tous notre part de responsabilité dans une telle confusion entre l’humour et la dérision. (— Annonçons-nous assez l’amour du Christ par ces mêmes médias et Internet ? -ndlr.)

Attention, la Parole de Dieu entre dans le débat !

Je prolonge en vous proposant quelques références bibliques, non d’abord pour étayer mes analyses, mais surtout pour mieux nous laisser « interpeller » par la parole de Dieu (— cette belle lettre d’amour de notre Père céleste, ndlr), pour lui donner d’entrer dans le débat. Comment discerner « évangéliquement » que l’on est bien en train de faire de l’humour et que l’on n’est pas sur la pente de la dérision ?

Il y a tout d’abord cette lame de fond de la Révélation attestée dans les deux Testaments: ce qui vient de Dieu élève et libère l’homme, alors que ce qui vient du Mauvais rabaisse et enferme.

Si l’on peut, dès lors, vérifier que des propos humoristiques contribuent â faire grandir, d’une manière ou d’une autre, ceux qui en sont les auteurs comme ceux qui en sont les objets, il ne m’étonnerait pas qu’ils puissent être comptés au nombre des mots inspirés par Dieu. En revanche, si l’on peut constater que des propos dérisoires abîment l’homme, ils sont alors des maux â mettre sur le compte du Mauvais.

Il me semble aussi que l’enseignement de Jésus sur la reconnaissance des arbres à leurs fruits nous met sur une très bonne piste.

« Il n’y a pas de bon arbre qui produise un fruit malade et pas davantage d ’arbre malade qui produise un bon fruit. Chaque arbre, en effet, se reconnaît au fruit qui lui est propre (…). L’homme bon, du bon trésor de son cœur, tire le bien et l’homme mauvais, de son mauvais trésor, tire le mal ; car ce que dit la bouche, c’est ce qui déborde du cœur. » (La Bible, Evangile de Luc, 6, 43-45).

Invité à plus de lucidité sur les « fruits » de ce que « dit ma bouche », j’accueille alors comme un complément à l’enseignement du Christ ce que Paul nous révèle sur « les fruits de l’Esprit » :

« Voici les fruits de l’Esprit : amour, joie, paix, patience, bonté, bienveillance, foi, douceur, maîtrise de soi. » (La Bible, Lettres aux Galates, 5, 22-23)

Et nous voilà alors mieux armés pour prendre personnellement et ensemble (oui, avec vous, internautes de passage ! – nldr) le chemin de conversion dont notre monde a tant besoin.

Pour « avoir de l’esprit », laissons l’Esprit nous habiter !

Celui qui aspire à devenir le disciple du Christ a, en effet, dans l’enseignement de Paul, je crois, des critères aussi simples que forts pour faire un bon discernement, pour éviter de confondre humour et dérision, pour avoir de l’esprit sans faire du mauvais esprit. Afin de ne pas être trop long (!), j’ai regroupé les fruits cités dans l’épître aux Galates deux par deux pour relire tout simplement nos manières de plaisanter :

1er groupe de fruits : la bonté et la bienveillance

Si je peux vériier que mes blagues – ceci dit sans mièvrerie – respirent la gentillesse, si je peux vérifier qu’elles permettent de mieux apprécier et faire apprécier ceux qui en sont l’objet, si nous pouvons vérifier que nos rires nous donnent d’exprimer un peu de la bonté qui nous habite, cela risque fort d’être de l’humour, à saveur évangélique.

Certes, Dieu seul est bon, mais ne sommes-nous pas créés à son image comme à sa ressemblance ? En revanche, quand nos blagues et nos rires séparent, déprécient, et parfois même excluent certains, à commencer par les plus petits et les plus fragiles, on est, me semble-t-il, sur la pente d’une dérision malveillante, et donc fort peu évangélique (— même pour une série TV, ndlr).

2eme groupe de fruits : la maîtrise de soi et la patience

Si je peux vérifier que mes blagues contribuent, même modestement, à dépasser un énervement maladroit, si l’on peut vérifier que nos rires nous appellent à une humble patience pour les autres comme pour nous-mêmes, cela risque fort d’être de l’humour, à saveur évangélique. En revanche, quand nos blagues et nos rires réveillent des instincts dont nous ne savons pas garder la maîtrise (je pense à la sexualité, mais aussi à la violence ou à la rancune) ou attisent des impatiences vis-à-vis de nous-mêmes ou vis-à-vis d’autres, à commencer par les plus petits et les plus fragiles, on est, me semble-t-il, sur la pente d’une dérision là aussi fort peu évangélique (— bon, inutile ici de se demander si The Young Pope flatte nos bons ou mauvais instincts !… -ndlr).

3eme groupe de fruits : la foi et la joie

Si je peux vérifier que mes blagues sont au service de la vérité, et d’une vérité qui humanise sans écraser parce qu’elle donne d’être paisiblement heureux d’y voir plus clair (— le ciel s’assombrit un peu pour l’Eglise avec The Young Pope, non ?), si nous pouvons vérifier que le rire déclenché ou le sourire suscité rend chacun simplement heureux, ne serait—ce que parce qu’ils aident à ne pas « se prendre la tête », ou se prendre trop au sérieux, cela risque fort d’être de l’humour, à saveur évangélique. En revanche, quand nos blagues et nos rires nous mettent au service du mensonge, quand ils contribuent, même « à petite dose », à déshumaniser en donnant de l’eau au moulin de ceux qui pensent qu’on ne peut plus croire en rien ni faire confiance à personne (et surtout pas au pape ou à l’Eglise, ndlr), on est, me semble-t-il, sur le terrain d’une triste dérision… là encore fort peu évangélique.

4° groupe de fruits : la paix et la douceur

Si je peux vérifier que mes blagues nous mettent, moi et mes auditeurs, bien simplement dans la paix, une vraie paix qui unifie nos vies en douceur, cela risque fort d’être de l’humour, â saveur évangélique. L’humour est plein de douceur, même quand il est rude, au sens où il laisse un bon goût dans la bouche. En revanche, quand nos blagues et nos rires jettent le trouble dans nos cœurs comme dans nos intelligences, en nous endurcissant illusoirement, on est, me semble-t-il, sur le terrain d’une dérision fort peu évangélique. Et on a bien raison de dire qu’il est des blagues qui sont de mauvais goût ! (— Et ce n’est malheureusement pas ce qui manque dans The Young Pope… ndlr.)

Humour rime avec amour!

Mais, au final, c’est même peut-être plus simple encore. Ne compliquons pas les choses. Le fruit, le premier fruit de l’Esprit, c’est l’amour ! Puissions-nous alors être pleins d’esprit ! (d’Esprit ?)

« Et par-dessus tout, revêtez l’amour. C’est le lien parfait. » (La Bible, 1ère lettre de Saint Paul apôtre aux Colossiens, 3, 14)

Mon humour contribue—t-il, même bien petitement, à bâtir un monde où l’amour ne cesse d’être mis à la première place ? Alors, non, on ne peut pas rire de tout ! Et sûrement pas de ce qui rend l’amour dérisoire.